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LETTRE OUVERTE DE SAM RAINSY A HOR NAM HONG
Sam Rainsy
11, rue Tiphaine
75015 PARIS
Paris, le 18 mars 2010
Monsieur Hor Nam Hong
Vice-Premier Ministre
Ministre des Affaires Etrangères
Membre du Comité Permanent (ex Politburo) du PPC
PHNOM PENH
Monsieur le Ministre,
Je vous écris pour vous demander, dans un souci de transparence, de bien vouloir clarifier aux yeux de l’opinion publique votre attitude par rapport au Tribunal à caractère international qui est en train de juger à Phnom Penh les anciens chefs Khmers rouges pour crimes contre l’humanité.
Le 7 octobre 2009, en même temps que cinq autres hauts dirigeants de votre gouvernement et de votre parti (PPC, ex-communiste, formé initialement d’anciens Khmer rouges), vous avez été convoqué par le Juge d’instruction français Marcel Lemonde pour témoigner devant le Tribunal.
Est-il vrai, comme le rapporte la presse (Cambodge Soir, 15 octobre 2009, "Avis de gros temps entre le Tribunal et le gouvernement" ; The Cambodia Daily, 17 mars 2010, "Testimony of Top Officials Sought At KRT, Again – Témoignage de plus hauts dirigeants à nouveau requis au Tribunal Khmer Rouge"), que vous refusez absolument de répondre à la convocation du Juge ?
Vous savez bien que vous êtes tenu par la loi de vous rendre à la convocation du Juge. Mais pourquoi refusez-vous de témoigner ? De quoi avez-vous peur ? Vous sentez-vous, grâce à votre position dans le gouvernement et dans votre parti omnipuissant, au-dessus de la loi ? Avez-vous la moindre considération pour le Juge Marcel Lemonde qui a été nommé par les Nations unies pour incarner la justice internationale ?
Votre parti et ses députés ont enlevé mon immunité parlementaire pour me traduire en justice dans des procès qui rappellent ceux de Prague. Mais vous, vous vous réfugiez derrière votre immunité blindée pour vous soustraire à la justice internationale, la seule qui soit digne de ce nom dans notre pays placé sous la férule de votre PPC.
Le Cambodia Daily rapporte que des magistrats du Tribunal international ont souligné le fait que, sous le régime des Khmers rouges, vous étiez "dans le secret de la marche du Ministère des Affaires étrangères dirigé par Ieng Sary à Phnom Penh" comme vous étiez très bien informé sur "le traitement des intellectuels au camp pénitencier de Boeng Trabek".
Des anciens détenus de Boeng Trabek ont témoigné sur les "bonnes relations" que Ieng Sary entretenait avec vous, ainsi que sur votre proximité administrative et organisationnelle avec ce troisième personnage du régime Pol Pot, actuellement poursuivi pour crimes contre l'humanité.
Qu’avez-vous fait pour mériter l'honneur d’être "réhabilité" par les Khmers rouges en 1978 alors que les massacres battaient leur plein? (Enquête de Justin Corfield et Laura Summers, Historical Dictionary of Cambodia, The Scarecrow Press, 2003).
Est-ce votre “zèle extraordinaire” à servir les bourreaux ou votre "méchanceté" et votre "sadisme" envers les prisonniers, selon les dires de ces derniers, qui vous ont permis de grimper les échelons khmers rouges?
Pourquoi ne pas aider la justice internationale, la seule qui soit indépendante et crédible au Cambodge, à lever un peu le voile sur ce jugement sibyllin du Père François Ponchaud à votre égard : "Le rôle de Hor Nam Hong au camp de Boeung Trabek n’est pas clair" ? (http://www.eurasie.net/webzine/spip.php?article824)
Pourquoi ne pas donner au Tribunal des éléments convaincants pour répondre à la question que Francis Deron pose ouvertement sur votre rôle à la prison de Boeng Trabek quand il parle de la nécessité de « faire le tri entre "kapos" et vrais prisonniers, entre lâches et victimes » (Le Procès des Khmers rouges – Trente ans d’enquête sur le génocide cambodgien, Gallimard, 2009).
Pourquoi ne pas discuter sereinement avec le Juge de l’accusation portée contre vous par votre ancienne co-détenue Keo Bunthouk qui a affirmé que vous aviez, par vos dénonciations auprès des Khmer rouges, "envoyé des victimes à leur mort au sinistre centre d’extermination S-21" ? (The Cambodia Daily, 12 janvier 2001, "Senate Continues Spirited Debate on KR Bill - Le Sénat continue de débattre vivement la loi sur les Khmers rouges").
On ne peut manquer d’être surpris par l’incohérence de votre attitude :
- D’un côté, vous portez plainte contre moi, pour une affaire relativement mineure de diffamation, devant un tribunal français à 10.000 km du Cambodge;
- Mais de l’autre côté, sur le même sujet que celui de la prétendue diffamation, à savoir votre rôle sous le régime Khmer rouge de 1975 à 1979, vous vous dérobez à la Justice mise en place sur le lieu même du drame en présence de tous les protagonistes encore vivants. Vous abusez de votre pouvoir local pour ignorer et boycotter ce Tribunal international appelé à juger les crimes commis par les Khmers rouges et leurs acolytes. Or, seul ce Tribunal peut faire la lumière sur votre passé et dissiper, éventuellement, les très graves soupçons qui pèsent sur vous. Ce n’est pas en ne vous rendant pas à la convocation du Juge que vous pourriez balayer définitivement ces soupçons. Presque deux millions de personnes ont été tuées par les Khmers rouges avec lesquels vous avez collaboré. Nous parlons ici de crimes contre l’humanité qui ne peuvent pas se résoudre par un euro de dommages et intérêts comme pour un procès en diffamation à Paris.
Peut-être espérez-vous vous faire dédouaner à bon compte à Paris et éviter ainsi votre vrai procès appelé à se tenir un jour à Phnom Penh...
Votre attitude fait preuve d’un grave mépris envers la Justice.
Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de mes sentiments distingués.
[signature]
Sam Rainsy
Député de Kampong Cham
Le 7 octobre 2009, en même temps que cinq autres hauts dirigeants de votre gouvernement et de votre parti (PPC, ex-communiste, formé initialement d’anciens Khmer rouges), vous avez été convoqué par le Juge d’instruction français Marcel Lemonde pour témoigner devant le Tribunal.
Est-il vrai, comme le rapporte la presse (Cambodge Soir, 15 octobre 2009, "Avis de gros temps entre le Tribunal et le gouvernement" ; The Cambodia Daily, 17 mars 2010, "Testimony of Top Officials Sought At KRT, Again – Témoignage de plus hauts dirigeants à nouveau requis au Tribunal Khmer Rouge"), que vous refusez absolument de répondre à la convocation du Juge ?
Vous savez bien que vous êtes tenu par la loi de vous rendre à la convocation du Juge. Mais pourquoi refusez-vous de témoigner ? De quoi avez-vous peur ? Vous sentez-vous, grâce à votre position dans le gouvernement et dans votre parti omnipuissant, au-dessus de la loi ? Avez-vous la moindre considération pour le Juge Marcel Lemonde qui a été nommé par les Nations unies pour incarner la justice internationale ?
Votre parti et ses députés ont enlevé mon immunité parlementaire pour me traduire en justice dans des procès qui rappellent ceux de Prague. Mais vous, vous vous réfugiez derrière votre immunité blindée pour vous soustraire à la justice internationale, la seule qui soit digne de ce nom dans notre pays placé sous la férule de votre PPC.
Le Cambodia Daily rapporte que des magistrats du Tribunal international ont souligné le fait que, sous le régime des Khmers rouges, vous étiez "dans le secret de la marche du Ministère des Affaires étrangères dirigé par Ieng Sary à Phnom Penh" comme vous étiez très bien informé sur "le traitement des intellectuels au camp pénitencier de Boeng Trabek".
Des anciens détenus de Boeng Trabek ont témoigné sur les "bonnes relations" que Ieng Sary entretenait avec vous, ainsi que sur votre proximité administrative et organisationnelle avec ce troisième personnage du régime Pol Pot, actuellement poursuivi pour crimes contre l'humanité.
Qu’avez-vous fait pour mériter l'honneur d’être "réhabilité" par les Khmers rouges en 1978 alors que les massacres battaient leur plein? (Enquête de Justin Corfield et Laura Summers, Historical Dictionary of Cambodia, The Scarecrow Press, 2003).
Est-ce votre “zèle extraordinaire” à servir les bourreaux ou votre "méchanceté" et votre "sadisme" envers les prisonniers, selon les dires de ces derniers, qui vous ont permis de grimper les échelons khmers rouges?
Pourquoi ne pas aider la justice internationale, la seule qui soit indépendante et crédible au Cambodge, à lever un peu le voile sur ce jugement sibyllin du Père François Ponchaud à votre égard : "Le rôle de Hor Nam Hong au camp de Boeung Trabek n’est pas clair" ? (http://www.eurasie.net/webzine/spip.php?article824)
Pourquoi ne pas donner au Tribunal des éléments convaincants pour répondre à la question que Francis Deron pose ouvertement sur votre rôle à la prison de Boeng Trabek quand il parle de la nécessité de « faire le tri entre "kapos" et vrais prisonniers, entre lâches et victimes » (Le Procès des Khmers rouges – Trente ans d’enquête sur le génocide cambodgien, Gallimard, 2009).
Pourquoi ne pas discuter sereinement avec le Juge de l’accusation portée contre vous par votre ancienne co-détenue Keo Bunthouk qui a affirmé que vous aviez, par vos dénonciations auprès des Khmer rouges, "envoyé des victimes à leur mort au sinistre centre d’extermination S-21" ? (The Cambodia Daily, 12 janvier 2001, "Senate Continues Spirited Debate on KR Bill - Le Sénat continue de débattre vivement la loi sur les Khmers rouges").
On ne peut manquer d’être surpris par l’incohérence de votre attitude :
- D’un côté, vous portez plainte contre moi, pour une affaire relativement mineure de diffamation, devant un tribunal français à 10.000 km du Cambodge;
- Mais de l’autre côté, sur le même sujet que celui de la prétendue diffamation, à savoir votre rôle sous le régime Khmer rouge de 1975 à 1979, vous vous dérobez à la Justice mise en place sur le lieu même du drame en présence de tous les protagonistes encore vivants. Vous abusez de votre pouvoir local pour ignorer et boycotter ce Tribunal international appelé à juger les crimes commis par les Khmers rouges et leurs acolytes. Or, seul ce Tribunal peut faire la lumière sur votre passé et dissiper, éventuellement, les très graves soupçons qui pèsent sur vous. Ce n’est pas en ne vous rendant pas à la convocation du Juge que vous pourriez balayer définitivement ces soupçons. Presque deux millions de personnes ont été tuées par les Khmers rouges avec lesquels vous avez collaboré. Nous parlons ici de crimes contre l’humanité qui ne peuvent pas se résoudre par un euro de dommages et intérêts comme pour un procès en diffamation à Paris.
Peut-être espérez-vous vous faire dédouaner à bon compte à Paris et éviter ainsi votre vrai procès appelé à se tenir un jour à Phnom Penh...
Votre attitude fait preuve d’un grave mépris envers la Justice.
Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de mes sentiments distingués.
[signature]
Sam Rainsy
Député de Kampong Cham
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